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Interview

Sébastien-Abdelhamid : “Du chemin a été fait, maintenant on voit des TN aux défilés de mode”

Après le succès de sa première collaboration dans la sneakers “Asics x Naruto Shippuden”, Sébastien-Abdelhamid sort le mode Ermite avec sa nouvelle paire “Naruto Mode Sennin” qui s’exportera aux États-Unis dès cet été. Mais ce n’est pas tout, il a su également enfiler sa casquette de réalisateur pour narrer 30 ans d’histoire de la sneakers à travers son nouveau documentaire “Sneakers Empire” disponible sur France TV Slash. Air Max, Yeezy, luxe, Jules Koundé, l’impact social des baskets… Rencontre avec un sensei de la sneakers.

En avril 2022 tu avais réalisé ta première collaboration de sneakers, la Asics x Naruto avec trois modèles : la Sasuke, la Itachi et la Kakashi. En décembre dernier, tu as renouvelé cette collaboration en sortant un nouveau modèle, pourquoi as-tu eu envie de continuer cette aventure ?

La magie du début est toujours là à chaque fois que je crée une nouvelle paire, il y a toujours en moi le même émerveillement. Tant au niveau de la création, dans le storytelling, dans ce que j’ai envie de vraiment partager avec les gens. Ça part de là l’émerveillement, jusqu’au moment où je vois les gens la porter. Toute cette ligne, entre la conception et la mise en rayon, il y a plein d’étapes qui ne font qu’entretenir cette flamme incroyable qui est la passion. Mais au-delà de la passion, pouvoir justement exprimer quelque chose à travers un produit qui est, on va dire, un produit iconique pour moi. 

J’ai essayé moi aussi d’atteindre mon Mode Sennin (Ermite) à l’instar de Naruto.

As-tu utilisé les mêmes ninjutsus pour concevoir la paire ?

(rires) Non, je n’ai pas utilisé les mêmes ninjutsus parce que sinon ça aurait été trop facile. Et Naruto, c’est un mec qui a su évoluer quand même. Il l’a fait pour lui d’abord et aussi pour tous les gens qui lui ont donné de la confiance. Donc j’ai dû essayer de suivre le même chemin et je n’ai pas voulu me reposer sur mes lauriers à appliquer la même recette que ce qu’on avait fait sur les trois paires précédentes. J’ai voulu vraiment prendre à contrepied et proposer quelque chose de différent, toujours avec des choses innovantes. J’ai essayé moi aussi d’atteindre mon Mode Sennin (Ermite) à l’instar de Naruto. J’aime raconter des histoires et partager quelque chose de sincère avec les gens. Peu importe la forme que ça prend, je n’ai pas envie que ça s’arrête.

Est-ce que ça marque la fin de l’arc Naruto pour toi ?

En tout cas c’est la fin, pour le moment. Il y a encore énormément de choses que j’ai envie de faire autour de Naruto, mais je n’ai pas envie non plus de m’enfermer uniquement là-dessus. C’est la quatrième paire autour de l’univers Naruto. Je pense qu’on a conclu cette première période, avec l’arc Pain / Naruto Mode Sennin avec la Asics GEL-NYC. Mais est-ce que j’y reviendrai ? Oui, parce que j’ai encore 1000 idées. L’avenir nous dira de quelle manière. Je suis déjà en train de travailler sur d’autres choses, d’autres univers, que ce soit en collab sneakers ou dans le textile. J’aime raconter des histoires et partager quelque chose de sincère avec les gens. Peu importe la forme que ça prend, je n’ai pas envie que ça s’arrête.

Asics GEL-NYC “Naruto Mode Sennin”, Asics x Naruto, Alexandre Silberman, 2023

As-tu eu d’autres propositions suite à cette collab ?

J’ai eu la possibilité de rencontrer des acteurs que je n’avais pas encore rencontrés dans le domaine du prêt-à-porter, qu’ils soient sportswear ou non-sportswear. On est très fier parce qu’on sort la paire aux États-Unis au mois de juillet 2024. Je remercie tout le monde.

On se souvient que la paire Kakashi avait leaké aux États-Unis en 2022.

Exactement. Mais là, c’est officiel, on a tourné un petit teaser qui est lié à Breaking Bad, c’est incroyable.

Tu avais rencontré les acteurs Daniel et Luis Moncada qui jouent Marco et Leonel Salamanca, c’est ça ?

Exactement. Même si on peut se demander de prime abord quel est le rapport entre Breaking Bad et Naruto, il y en a un et vous pouvez le découvrir dans le spot. On aurait pu juste se contenter de faire une communication autour de Naruto, sachant qu’en resell aux États-Unis la paire s’est extrêmement bien vendue, il y a eu une vraie demande. Mais j’ai voulu prendre à contrepied, aller sur un territoire purement américain et jouer avec ces deux univers, c’est rigolo.

Sébastien-Abdelhamid x Daniel et Luis Moncada – Coulisses tournage spot publicitaire US Asics x Naruto, 2024 

En faisant ces deux collaborations Asics x Naruto, tu as pu mettre un pied dans “l’empire de la sneakers. Je fais évidemment référence au documentaire « Sneakers Empire » que tu as sorti en avril dernier sur France TV Slash. Qu’est-ce qui t’as motivé à faire ce documentaire ? 

Ce documentaire, je voulais le faire depuis 10-15 ans. Après, il s’avère que le monde de la sneakers a été bouleversé il y a quelques années et s’est mué en quelque chose d’autre. C’est d’autant plus important, après cette mutation, de proposer quelque chose qui soit un témoignage à travers mes yeux, de comment j’ai vu évoluer cette culture sur 30 ans. Il y a eu de très bons documentaires sur la sneakers, mais plutôt orientés sur l’étranger, sur les États-Unis, en particulier. Il n’y avait rien qui documentait et qui expliquait aux générations qui sont tombées dans la sneakers pourquoi on en est arrivé là, en France. Ce qui m’intéressait, c’était la transmission parce que c’est avant tout quelque chose de culturel et pas quelque chose de mercantile. Pour moi, chaque paire représente quelque chose. Quand je la regarde, elle doit me procurer une émotion, me raconter une histoire. Je l’associe à un lieu, une personne, un événement, etc… La sneakers c’est un phénomène culturel et sociologique.

Pour moi, la plus belle récompense, c’est d’avoir des avis de gens de typologies différentes dans leur attrait à la sneakers et qui me disent : “J’ai passé un bon moment, j’ai appris des choses, je ne savais pas ça.”

À qui s’adresse “Sneakers Empire” ?

Ce documentaire est accessible à tous. Que tu sois passionné de la première heure ou depuis très récemment il s’adresse à toi. Et il s’adresse aussi aux gens qui ne savent pas grand-chose là-dessus, mais qui se posent des questions sur : “Pourquoi autour de moi je vois que des gens qui portent des baskets ?”. Pour moi, la plus belle récompense, c’est d’avoir des avis de gens de typologies différentes dans leur attrait à la sneakers et qui me disent : “J’ai passé un bon moment, j’ai appris des choses, je ne savais pas ça.” C’est ça l’intérêt. C’est vraiment une transmission de vécu, d’expériences, de ressenti et de passion à tout le monde. C’est du partage.

On voit des TN sur des défilés de mode, on se dit qu’il y a du chemin qui a été fait.

Dans ce documentaire, Mouloud Achour évoque les Air Max, à son époque, comme une paire pour traîner à la cité. Aujourd’hui, on voit que la Air Max est portée partout, on peut observer Inoxtag porter des TN et influencer sûrement d’autres jeunes de toutes catégories sociales à en porter. De quel œil vois-tu ce cheminement-là ? Est-ce une fierté de voir une telle culture émerger et s’imposer à ce point ?

En tant que passionné, je ne peux qu’être heureux de voir aujourd’hui les jeunes générations s’approprier des modèles qui étaient plus réservés à la rue à l’époque. Comme Mouloud le dit très bien dans le documentaire, la Air Max, ça n’a jamais été pour courir. Pour nous, c’était les chaussures de la street. On a vu un glissement de certains modèles se mouvoir de la rue, à s’étendre sur une proportion plus large de la population et tant mieux. Ça montre encore une fois que l’influence de la rue est réelle pas que dans la sneakers, mais globalement. Donc, les cultures qui sont issues de la rue s’étendent par la suite jusqu’au luxe par exemple. On voit des TN sur des défilés de mode, on se dit qu’il y a du chemin qui a été fait. Mais ça, si on ne l’explique pas, on ne peut pas forcément le comprendre si on n’a pas vécu cette époque-là. Donc c’est là aussi, où il y a une volonté de transmission qui est importante pour moi.

Mouloud Achour, Sneakers Empire, 2024

Une volonté de reconnaissance aussi ?

Complètement. Mais en vrai, je pense que les gens qui portent des sneakers depuis 30 piges, ils s’en tapent un peu de la reconnaissance. Dans le sens où si on kiffe porter des paires, on a besoin de la reconnaissance de personnes. On sait ce qu’on porte, pourquoi on le porte, comment on le porte et après, si d’autres passionnés apprécient comment on porte telle paire, tant mieux. Mais avoir une culture qui se légitime par l’épanouissement de celle-ci dans une sphère du luxe, pour moi, il n’y a pas de formes de reconnaissance là-dedans. C’est une forme de globalisation, mais il n’y a pas de gloire à dire que la sneakers atterrit dans le luxe. Il y a, par contre, une forme d’appropriation de la culture de la rue par le luxe, c’est un fait clair et net.

Il y a eu une explosion des collaborations entre sneakers et monde du luxe. Pour toi, qu’est-ce qu’une “bonne collab” ? Quels ingrédients faut-il y mettre ?

Pour moi, c’est avant toute chose la sincérité dans ce qu’elle transmet. Ça doit être un bon design, quelque chose qui se doit d’être confortable parce que ça reste une sneakers. Au-delà du design, je pense qu’une collab réussie, c’est une collab qu’on peut s’imaginer porter ou voir aux pieds des autres. Le luxe, c’est un domaine qui fait preuve de peu de sincérité envers les consommateurs premiers de sneakers. Et quand je dis premier, ce n’est pas forcément les gens qui étaient là il y a 30 ans, mais les gens qui sont là aussi depuis un an et qui juste aiment porter de la basket. C’est comme toutes les cultures de la rue, le luxe se les approprie à un moment ou un autre parce que ça devient des cultures plus mainstream. Le luxe ce n’est pas mon truc. Mais pour autant, il y a des pièces que je peux aimer, trouver jolies, où je peux comprendre la démarche même le coût derrière certaines pièces. Qu’une paire vaille 700 € ou 150 €, ce n’est pas son prix qui va définir, pour moi, ni son attrait, ni sa beauté.

Ce que j’aime bien chez mon gars Jules (Koundé), c’est l’audace dans ce qu’il porte.

En parlant de collaboration, tu as aussi pu rencontrer Jules Koundé qui, en plus du football, est très identifié par son goût pour le luxe. Peux-tu nous raconter cette association ?

Jules (Koundé), c’est mon gars de fou. Je suis super content parce que je lui ai fait une pièce spéciale, un haut de la Team Rocket avec la marque Pièces Uniques qu’on a fait spécialement pour un shooting avec GQ. C’était très cool parce qu’on a voulu faire quelque chose de différent, en clin d’œil, sans être trop premier degré, mais en même temps la référence à Pokémon est évidente. Ce que j’aime bien chez mon gars Jules, c’est l’audace dans ce qu’il porte. L’audace, parfois est récompensée, parfois pas. Lui, au-delà de l’audace, il a du goût. Je ne valide pas tout à 100 % mais honnêtement, je valide grandement ce qu’il porte et de toute façon, il le porte bien à chaque fois.

Jules Koundé, GQ, 2023, Fabien Montique

Dans le genre personnalité qui ont pu collaborer avec des marques, tu évoques aussi le groupe Run-DMC qui a été pionnier au niveau des collaborations entre le Hip-hop et les marques de sneakers, notamment avec Adidas. Dans le rap FR ou US, est-ce qu’il y a un nom qui te vient en tête quand on parle d’incarner la sneakers ?

En 1999, dans le livret de l’album “Le Code de l’honneur” de Rohff, on le voyait avec une paire de requin. Déjà à cette époque là c’était quelque chose. Côté US, il y avait la Air Force 1 qu’on pouvait voir aux pieds de Jay-Z. Sinon, un truc plus récent c’était quand Booba avait porté la Air Mag dans le clip de Caramel en 2012, c’était assez ouf parce que c’était une paire qui a cristallisé beaucoup d’envie, beaucoup de fantasmes chez tous les passionnés après son apparition dans le deuxième volet de “Retour vers le futur”.

Lucas Henicher

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