Pedro Winter : son amitié avec Pharrell, la séparation des Daft Punk et la naissance de la French Touch

Fondateur du label Ed Banger Records, Pedro Winter a largement contribué à faire rayonner la musique électronique Française à travers le monde. Le patron de la French Touch se confie dans Clique sur sa rencontre improbable avec Justice, les coulisses de la collaboration entre Pharrell et Daft Punk et son amitié avec DJ Mehdi. 

Le grand frère des Daft Punk

Pedro Winter commence sa carrière en tant que manager des Daft Punk. À l’époque, son rôle consiste surtout à filtrer les innombrables demandes de collaborations. “Il y a eu à peu près tous les gens de la pop culture de l’époque. Mon regret, c’est qu’il y a eu une rencontre avec George Michael, mais ils ne sont pas allés au bout”. Si la collaboration professionnelle avec le duo s’arrête en 2008, l’amitié, elle, perdure. “Quand ils se sont séparés, j’ai pris la nouvelle comme un grand frère. Je l’ai accepté et j’ai accompagné leur séparation sans m’apitoyer”.

Daft Punk, Cassius, Myd, Dj Mehdi, Justice… Ces légendes de la musique électronique ont toutes été produites par Pierre alias Pedro Winter. “Pedro c’était mon surnom quand je faisais du skate”. Patron et fondateur d’Ed Banger Records, manager d’artistes et DJ sous le pseudonyme Busy P, il a été un acteur majeur de l’avènement de la French Touch, qu’il décrit comme “un courant musical et un élan culturel collectif, comme la Nouvelle Vague dans le cinéma”. 

La naissance d’Ed Banger 

“Au départ, j’écoutais de la musique rock, heavy metal, punk. Ensuite, j’ai beaucoup voyagé aux États-Unis donc je me suis pris le rap. La musique électronique est venue après avec les raves”. Le déclic survient lorsqu’un jour, son frère lui fait écouter le titre “It’s More Fun to Compute” de Kraftwerk. Très vite, Pedro commence à organiser des soirées dédiées à la musique électronique. Il commence au Folie’s avant d’être repéré en 1995 par David Guetta. “À l’époque, c’était le king de la nuit parisienne, il m’a débauché pour venir organiser mes soirées dans son club”. Ces fêtes deviennent alors le point de ralliement de toute la scène électronique parisienne.

« Laissons un peu planer le mystère »

Pharrell Williams, Tyler The Creator et Varnish La Piscine… Pedro Winter revient sur la probable collaboration derrière la mystérieuse photo qui a fait parler tout Internet. pic.twitter.com/PLuC7C9QoO

— CLIQUE (@cliquetv) May 28, 2025

En 2003, il fonde le label Ed Banger Records et signe les talents émergents de ce mouvement musical : Cassius, DJ Mehdi, SebastiAn, Mr Oizo… C’est aussi à cette époque qu’il rencontre Justice. “On s’est rencontrés lors d’une raclette. Dès le départ notre relation a été particulière, on a même signé un contrat avec notre sang”. Au même moment, Busy P travaille sur son propre album solo, qu’il met en pause pour se consacrer à ses artistes. “On est en retard, on a fait l’annonce en 2004”, dit-il en riant. 

À la tête de son label, Pedro Winter joue au directeur artistique et au “facilitateur”. Il parvient souvent à connecter ses artistes avec les plus grandes stars : SebastiAn et Frank Ocean, Justice et The Weeknd, Cassius avec Kanye West et Jay-Z, Daft Punk avec Pharrell Williams… “J’ai rencontré Pharrell un peu au toupet. J’ai trouvé l’adresse de son studio à New York et je lui ai fait écouter ‘Harder Better Faster Stronger’ de Daft Punk. Il est tombé de sa chaise”. Plus récemment, Pedro Winter a publié sur ses réseaux une photo de Varnish la Piscine, fraîchement signé chez Ed Banger, en studio aux côtés de Tyler, The Creator et Pharrell. “J’ai appelé Pharrell pour qu’ils se rencontrent, pour écouter de la musique et peut-être faire des choses ensemble”.

L’héritage de la French Touch

Alors que la musique électronique était longtemps marginalisée, Pedro Winter se réjouit aujourd’hui de son triomphe. “Je pense qu’il y a toujours des clichés dont il faut se débarrasser, mais quand tu vois DJ Snake remplir le Stade de France, ça sert la cause. Ça rend la musique électronique plus accessible, plus compréhensible”. À 50 ans, il a plus que jamais envie de transmettre sa passion aux jeunes générations. “L’intérêt de notre travail ces 30 dernières années a été d’inspirer les plus jeunes. Je suis à fond pour que quelqu’un d’autre écrive le bouquin de la French Touch”. Pedro Winter continue par ailleurs à mettre en lumière de nouveaux talents de la scène électronique, à l’image de la prochaine signature du label Ed Banger : Tatyana Jane. “C’est une jeune artiste Franco-camerounaise, amoureuse de la musique électronique mais qui a conservé un bagage culturel fort.”

Pour cela, il s’applique à raconter l’histoire des artistes qui l’ont entouré. “Je suis un pion de cette histoire, celui qui a traversé les époques et les modes. Donc je suis d’une certaine façon la personne qui peut le mieux la raconter”. C’est ce qu’il a tenté avec le documentaire “Made in France” sur DJ Mehdi – “Ça a été un tsunami culturel” – et dans une prochaine série de podcasts sur France Inter dès cet été.

L’interview de Philippe Etchebest est à retrouver gratuitement et en intégralité sur l’application CANAL+ et en podcast sur Spotify, Apple Podcasts et Deezer.