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Société

CLIQUE TALK – AZYLE : « La RATP s’est prise à son propre piège »

Tagueur solitaire, Azyle est une légende du milieu. Amoureux du métro, il a tagué ses couloirs 17 ans durant, avant de se faire arrêter. La RATP, qui lui réclame environ 200 000 euros, a pourtant fait décaler son audience le 7 octobre dernier. Peut-être à ses dépens... Alors que le procès en appel aura lieu le 2 mars prochain, Azyle affirme que ce délai lui a permis de se procurer un document prouvant la mauvaise foi de la compagnie de transports.

Comment avez-vous perçu la demande de renvoi de la RATP lors de la dernière audience ?
Plutôt mal. Dans un premier temps j’ai vu ça comme « une occasion ratée » car je me sentais prêt à plaider ma cause et évoquer le fond du dossier devant des avocats de la RATP apparemment un peu déboussolés par l’intérêt médiatique qu’avait suscité ma stratégie de défense. L’ambiance était spéciale pour une cour correctionnelle : comme le sujet du graffiti est banalisé, de nombreux journalistes étaient présents. C’est dommage, je me sentais dans un bon jour après presque 10 ans d’attente.

Revoir notre interview d’Azyle :

Je déplore que le renvoi soit lié à des « problèmes » de procédure ou des raisons administratives. Les avocats de la RATP ont prétexté ne pas être en mesure de la défendre, soi-disant parce que mon avocat venait tout juste de leur transmettre par écrit ma ligne de défense. De fait, ils la connaissaient déjà puisque mon affaire avait déjà été jugée trois ans plus tôt devant le tribunal, et que j’avais déjà transmis des éléments écrits et documentés. Du coup personne n’a compris le véritable motif de cette demande.

Avec le recul, c’est un mal pour un bien. Grace à ce renvoi, j’ai trouvé une nouvelle preuve accablante qui met la RATP face à ses mensonges et ses contradictions.

De quelle preuve s’agit-il ?
En classant certaines de mes archives, j’ai retrouvé un peu par hasard un morceau d’article provenant d’une revue interne de la RATP qui vantait les mérites d’un produit de nettoyage « miracle » utilisé en 1996 pour nettoyer les graffitis… C’était trop beau pour être vrai mais je n’avais pas le numéro du magazine pour identifier cette jolie trouvaille. Du coup, je me suis mis en tête de le retrouver en me rendant au sein même de la RATP… Après une longue après-midi sur place je suis tombé sur le Graal !

Preuve_Article_interne

Ce document émanant directement de la RATP démontre son mensonge sur le nettoyage des graffitis.

La RATP affirme qu’il faut en moyenne une heure pour nettoyer un mètre carré. Elle se sert de ce chiffre pour évaluer son préjudice. Le problème, c’est qu’elle refuse d’expliquer comment elle calcule ce chiffre, ainsi que tous ceux qu’elle utilise.

Elle affirme, il faut la croire, c’est tout. « Circulez, y’a rien à voir ». Comme vous le savez, puisque vous les avez filmés, j’ai effectué des essais dans des conditions reproduisant la réalité (peinture, film de protection et produit de nettoyage). Ces essais réalisé devant un huissier de justice ont démontré que le temps pour nettoyer un tag est au moins dix fois moins élevé que le chiffre avancé par la RATP. J’ai même demandé à pouvoir faire ce test sur un bout de rame de métro en payant tous les frais, mais bien évidemment je n’ai pas eu de réponse.

Le document que j’ai retrouvé, un magazine interne de la RATP datant de 1996, indique qu’avec le produit Grafforange un graffiti de 40 cm sur 40 cm est nettoyé en moins de 30 secondes (donc 1 m² en moins de 3 minutes…). Là encore la RATP dit le contraire aux juges. Moralement je trouve ça magnifique de trouver cette preuve accablante presque « grâce » à la RATP, moi qui avait épuisé tous les recours possible dans ma quête pour la vérité. C’est comme si la chance commençait à tourner… La RATP s’est prise à son propre piège quelque part, le renvoi qui devait l’aider produit l’effet inverse.

Mais comment avez-vous fait pour que la RATP accepte votre présence dans ses locaux ?
J’ai appelé la responsable du service des archives de la RATP qui m’a orienté vers une personne pour prendre en compte ma demande. Un rendez-vous officiel m’a ensuite été donné pour consulter de la documentation.

Vous avez pris ce rendez-vous en toute légalité ?
Oui.

Et la RATP ne s’est pas méfiée de vous?
Non. Pourtant je décline toujours mon identité civile dans tous mes échanges ou mes demandes avec la RATP. Cependant la RATP est une grande entreprise avec de nombreux services et dans ce contexte, je passe incognito. Même s’il semble qu’Azyle soit une cible répertoriée pour le service juridique, les autres départements de la RATP n’en sont pas forcément informés… Il fallait juste tenter.

Pourquoi la RATP ne communique pas ces documents, d’après vous?
Depuis de nombreuses années, les avocats de la RATP utilisent toujours le même mode de défense auprès du TGI de Paris (le Tribunal de Grand Instance, NDLR). Malgré de nombreuses incohérences, la RATP obtient systématiquement et « facilement » la condamnation des tagueurs mis en cause. Pourquoi la RATP changerait-elle ses procédés qui ont fait leurs preuves et ont toujours été efficaces jusqu’à présent ? La RATP changera et évoluera peut-être le jour où la justice rendra une décision qui n’ira pas dans son sens…

Êtes-vous confiant pour votre procès ?
Ce n’est pas le mot qui me vient à l’esprit, mais je pars du principe que la justice va fonctionner selon les règles, sinon à quoi bon ? Si la RATP a commis des erreurs ce n’est pas à moi d’en subir les conséquences. J’assume ce que j’ai fait c’est tout. Je suis allé plus loin en démontrant devant huissier que la RATP fausse les choses depuis toujours. J’apporte aujourd’hui une preuve qui vient de leurs archives internes… Que puis-je faire de plus ?

La suite va dépendre de ce que vont en penser les juges mais évidemment, je n’ai pas le beau rôle. Je n’ai pourtant jamais nié les faits, ce qui devrait me permettre de revendiquer le droit à la vérité. Je n’en dirais pas autant de tout le monde. Vais-je enfin être entendu ?

Vous avez tenu à nous faire parvenir une photo de votre fille qui désigne un de vos tags. Que signifie ce cliché pour vous?
Je prends ces photos pour prouver que la RATP n’a pas changé les vitres qu’elle a facturées dans ma procédure alors qu’elle dit les avoir remplacées. Ca démontre également que lorsqu’elle évoque un préjudice d’image, il n’en est rien.

azyle fille rapt métro

Ma fille n’était pas née lorsque j’ai fait ces signatures à l’acide, et elles circulent encore aujourd’hui. J’adore l’emmener avec moi, c’est un instant de partage. C’est tellement beau quand elle les découvre avec moi et qu’elle reconnaît ma signature. Avec sa vision d’enfant, elle voit ces tags comme de simples images, rien de plus…

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