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Arts

Cannes 2018 : sa sélection officielle, ses paillettes et… ses cinéastes opprimés

Deux réalisateurs sélectionnés en compétition au 71e Festival de Cannes ne pourront pas présenter leur film sur la Croisette : l’Iranien Jafar Panahi (Three Faces) et le Russe Kirill Serebrennikov (Leto) sont assignés à résidence
dans leurs pays respectifs. Deux noms qui s’ajoutent à la liste -trop- longue de ces cinéastes interdits de festival ou sanctionnés par des décisions politiques.

  • 2018 : Kirill Serebrennikov et Jafar Panahi

Accusé d’avoir détourné des fonds publics dans une affaire très politisée, Kirill Serebrennikov est assigné à résidence à Moscou jusqu’au 19 juillet 2018. Très critique envers Vladimir Poutine, il fait partie de cette nouvelle génération d’artistes russes globe-trotters. C’est aussi un défenseur des droits des homosexuels dans son pays.

Mercredi 9 mai, c’est donc par procuration que le réalisateur a monté les marches du Festival de Cannes. Sous les ovations du public, son équipe lui a rendu hommage en brandissant une pancarte géante avec son nom.

Le délégué général du Festival de Cannes, Thierry Frémaux, brandit une pancarte où est inscrit le nom du réalisateur russe Kirill Serebrennikov sur les marches du Palais des Festivals, le 09 mai 2018 © AFP /Valery HACHE

La bande-annonce de Leto de Kirill Serebrennikov

Jafar Panahi, lui, n’en est pas à sa première assignation. Le cinéaste iranien est interdit de voyager mais aussi de tourner dans son pays. Pour autant, cela ne l’empêche pas de filmer (clandestinement) et même d’être primé par un Ours d’or à Berlin pour son film Taxi Téhéran. En 2010, il avait même été emprisonné alors qu’il était invité à faire partie du jury du festival de Cannes.

La bande-annonce de Three Faces de Jafar Panahi

Cette année, le réalisateur n’a donc pas pu présenter son nouveau film, Three Faces. Accusé de propagande contre le système, sa vision des maux de la société iranienne est une véritable épine dans le pied des conservateurs iraniens.

  • 2011/2017 : Mohammad Rasoulof

Mohammad Rasoulof connait lui aussi les mêmes problèmes que son compatriote Jafar Panahi. En 2011, le cinéaste doit présenter, lors de la sélection « Un certain regard », son deuxième long métrage, Au revoir. Mais, au moment de prendre l’avion, le cinéaste est convoqué par la police à Téhéran. Il revient sur la Croisette en 2013 et 2017, et obtient le prix « Un certain regard » pour son film Un homme intègre. Mais, cinq mois plus tard, il se fait retirer son passeport à l’aéroport de Téhéran et il est mis sous surveillance policière.

La bande-annonce de « Au revoir » de Mohammad Rasoulof

  • 2007 : Lou Ye

Lou Ye tourne Summer Palace. Le film traite des événements de la place Tiananmen occupée par les étudiants au printemps 1989 et de la répression sanglante qui s’est ensuivie. Pas du goût du régime chinois qui refuse que le film soit présenté au festival de Cannes en 2007. Lou Ye décide de braver l’interdiction. Le régime chinois ne lui pardonnera pas cette rébellion : il est interdit de tournage pendant cinq ans par l’organisme de censure de son pays.

La bande-annonce de Summer Palace de Lou Ye

  • 1994 : Yin Li

Lou Ye n’est pas le seul cinéaste chinois à s’être vu interdire de festival. En 1994,
Yin Li, sélectionné dans la catégorie « Un certain regard » pour L’Histoire de Xinghua se voit refuser un visa de sortie de territoire. Le film avait pourtant reçu l’accord de la commission de censure…

La bande-annonce de L’Histoire de Xinghua de Yin Li

  • 1994 : Yilmaz Güney

Le réalisateur turc, Yilmaz Güney, est sélectionné en compétition officielle pour Yol, la permission. C’est en prison qu’il tourne une grande partie de
son film. Il s’évade, s’enfuit en France pour le terminer et remporte la
Palme d’or, ex aequo avec Missing, de Costa-Gavras. Deux ans plus tard, il
meurt d’un cancer sans avoir pu retourner en Turquie.

La bande-annonce de Yol, la permission de Yilmaz Güney

yol

  • 1978 : Andrzej Wajda

La guerre froide a été une époque semée d’embuches pour le festival de Cannes. Chaque année, les membres du comité négociaient avec les pays du bloc soviétique pour inviter les réalisateurs dissidents. Gilles Jacob, alors
délégué général du Festival, se rend à Varsovie pour visionner L’Homme de marbre, du réalisateur polonais Andrzej Wajda. Il souhaite sélectionner le film mais se heurte à un refus catégorique de la Pologne. Comme dans un film d’espionnage, Gilles Jacob fait alors passer d’Est en Ouest les bobines de L’homme de marbre au nez et à la barbe des régimes communistes. Le film sera présenté à Cannes sans son réalisateur et avec un faux nom : « J’irai cracher sur vos tombes… »

La bande-annonce de L’Homme de marbre de Andrzej Wajda

Texte : Doria Laib
Image à la Une : 9 mai 2018 à Cannes – Pierre Lescure, Ilya Stewart, Roman Bilyk, Irina Starshenbaum, Teo Yoo, Thierry Fremaux et Charles-Evrard Tchekhoff avec une pancarte sur laquelle est inscrit le nom du réalisateur Kirill Serebrennikov © Stephane Cardinale / Getty Images.

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