Milli Vanilli : la plus grosse arnaque musicale de l’histoire racontée par son ex-membre

Étienne Klein est physicien et philosophe des sciences. Directeur du Laboratoire de recherche sur les sciences de la matière, il est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages de vulgarisation. Dans Clique, il parle de la progression du platisme chez les jeunes, raconte comment la vérité est devenue subjective et prévient que l’IA pourrait faire régresser l’humanité.
Où va le monde ?
Pour Étienne Klein, l’accès instantané à l’information offert par internet est à double tranchant. “On est devenus trop rapides. Quand vous vous posez une question, il est intéressant de l’explorer par soi-même ou en discutant, ce cheminement vous fait progresser.” Il déplore que ses étudiants aient le clic facile et y perdent une forme de “joie intellectuelle”. Sans pour autant s’exclure de l’équation : “même pour moi, la tentation de chercher la bonne réponse est quasiment irrésistible.”
Le physicien s’inquiète tout particulièrement de l’avenir de la lecture. “Notre société s’est construite sur l’invention de l’imprimerie. Si l’on perd la capacité de concentration que demande la linéarité d’une page de livre, on y perdra beaucoup.” L’opposition entre livres et téléphones portables est loin d’être un cliché : “si vous lisez avec votre téléphone posé à côté, même verrouillé, il est prouvé que votre lecture sera perturbée par l’objet concurrent. Le futur va être déterminé en partie par ce à quoi nous accordons notre attention.”
Encore faut-il avoir un futur dans lequel se projeter : Étienne Klein regrette le manque d’imagination du XXIe siècle quant à l’avenir. Lui a grandi dans les années 70. “On était obsédés par l’an 2000, comment on allait voyager, communiquer… C’était en partie faux, mais on pouvait se projeter. Aujourd’hui on prédit rarement le futur, encore moins de façon attractive.” De quoi affecter “psychiquement” les jeunes générations. L’un des grands chantiers préconisés par le physicien et philosophe, c’est la reconstruction d’un rapport optimiste à l’avenir. Il appelle à définir “un récit qui tient compte de ce qu’on veut et de ce qu’on sait. Sans partir dans l’utopie, il s’agit de construire quelque chose de souhaitable et de crédible.”
"17% des 11 à 23 ans pensent que la Terre pourrait être plate"
Et si le platisme était une invention des réseaux sociaux ? C'est la théorie du physicien Etienne Klein face à la montée de cette croyance chez les jeunes. pic.twitter.com/9oIm6O2wJU
— CLIQUE (@cliquetv) May 4, 2025
La science qui dérange
Étienne Klein a vécu l’arrivée d’internet, il n’en pense pas que du bien. Pour lui, la numérisation du monde donne le champ libre à nos biais cognitifs. “On est en train de passer un test d’intelligence collective : le numérique propage du faux et notre cerveau le privilégie souvent au vrai, qui n’est peut-être pas assez sexy.” Comme dans le cas du platisme, qui n’est pas forcément une vieille croyance. “Les Grecs anciens savaient déjà que la terre est ronde. C’est comme si le platisme était une invention récente, dopée par les réseaux sociaux.” Pour le scientifique, le vrai est devenu une affaire subjective. Un danger de taille : “cela me semble être une menace pour la cohésion de la société, qui mène à ce qui se passe aux États-Unis.” Outre-atlantique, des coupes drastiques sont imposées à la recherche par le duo Donald Trump-Elon Musk.
Ces coupes budgétaires n’étonnent pas le physicien : pour lui, il arrive que la science dérange. “Au XVe siècle, le philosophe Thomas Hobbes prédisait que si une vérité scientifique venait à déranger les intérêts du pouvoir, on trouverait toutes sortes de stratagèmes intellectuels pour ne pas croire ce que l’on sait.” La prophétie s’est réalisée : des climatologues sont licenciés aux États-Unis.
Là où certains s’en prennent à la science, d’autres cherchent à la dévoyer. Comme en espérant utiliser l’IA pour prédire le risque de récidive chez les criminels, façon Minority Report. “Ça m’effraie”, confesse le scientifique. “Le comportement humain est plus compliqué qu’un électron. On ne peut pas le réduire à des statistiques, il est capable de se contredire, de dire non à sa propre pensée.” Quand bien même une telle fiction deviendrait réalité, Étienne Klein y verrait une faillite morale. “Nos actions peuvent être déterminées par des paramètres qui nous échappent, mais je pense que l’intensité de l’existence réclame que l’on parie sur le libre arbitre. Et qu’on assume donc notre responsabilité.” Cette fois, c’est le philosophe qui parle.
L’entretien avec Étienne Klein est à retrouver gratuitement et en intégralité sur myCANAL.
"Tenet m'a agacé, le film mélange deux concepts différents"
Retour vers le futur, Matrix, Mars Attacks… Le physicien Étienne Klein décrypte quels films de science-fiction sont crédibles scientifiquement. pic.twitter.com/ypeVBa8myi
— CLIQUE (@cliquetv) May 6, 2025