Clique avec Michelle Perrot et Thomas Rohmer
Face à la censure des poitrines de femmes et de personnes trans, Meta se prépare à changer les règles en place sur Insta et Facebook. Mais comment assurer plus d’égalité, alors que l’utilisation d’intelligence artificielle pour modérer les publications fait débat ?
Cette décision fait suite à la censure par Facebook de deux publications d’un compte géré par un couple transgenre aux États-Unis. Les posts, qui ont été dépubliés par un système d’intelligence artificielle après des signalements d’utilisateurs, affichaient les poitrines dénudées du couple - avec les tétons couverts - accompagnées d’un texte afin de lever des fonds pour une intervention chirurgicale de transition de genre. Meta a ensuite fait marche arrière en annulant la censure.
https://twitter.com/Keyade/status/1620785928292945920
Derrière les règles sur la nudité, la question de la modération automatique
Le conseil de surveillance, créé en 2020 par Mark Zuckerberg, pointe du doigt des règles basées sur "une vision binaire du genre et une distinction entre les corps masculins et féminins ». Sa décision dénonce des politiques qui "entravent la parole des femmes, des personnes trans et des personnes non binaires sur ses plateformes ». Aujourd’hui, les mamelons de femmes sont censurés sur Facebook et Insta à l’exception des images d’allaitement ou encore de visuels liés à la lutte contre le cancer. Les tétons masculins, eux, sont autorisés.
"Il n'est pas facile pour une technologie automatisée de prendre une décision sur qui est un adulte aux seins nus, par rapport à qui est un enfant aux seins nus". (La militante Jillian York)Au-delà du flou qui règne autour des règles de modération, se pose aussi la question de l’automatisation de la censure. En clair, une IA peut-elle vraiment bien faire la différence entre ce qui relève ou non de porno ? "Le contexte est essentiel, et les algorithmes sont très mauvais en la matière », explique au Guardian Emily Bell, directrice du centre de recherche digital de la Columbia Journalism School. "Il n'est pas facile pour une technologie automatisée de prendre une décision sur qui est un adulte aux seins nus, par rapport à qui est un enfant aux seins nus », analyse également la militante Jillian York, responsable de la liberté d’expression internationale à l’ONG Electronic Frontier Foundation. Pas sûr que Meta, qui a 60 jours pour publier une réponse aux recommandations du conseil, arrive facilement à mettre fin aux débats.
Crédit photo : page Facebook Free the Nipple Brighton.