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Musique

Le Hip-Hop en France : naissance et évolution en 7 photos, avec Thomas Blondeau

Depuis les rassemblements des B-Boys au Trocadéro et les premiers concerts du Globo jusqu’aux succès populaires d’IAM, Booba ou des membres de la Sexion d’Assaut, le Hip-hop français a traversé trente ans. Durant cette période, le rap a réussi, petit à petit, à se frayer une place de choix dans les classements musicaux populaires jusqu’à devenir le genre le plus écouté en France (cf. classement Spotify 2016).

C’est cette histoire que Thomas Blondeau, spécialiste de rap, ancien rédacteur en chef des magazines spécialisés R.E.R et Radikal (et B-Boy en activité) a décidé de raconter à travers son ouvrage Hip-Hop : une Histoire française. Pour Clique, il partage et commente sept photos tirées de son livre pour tenter de retracer cette épopée.

 

Stalingrad

©Enrique/Aktuel Force

1. Coincé entre les stations Stalingrad et La Chapelle, ce terrain vague découvert en 1986 par des graffeurs est semblable à des dizaines de terrains de la région parisienne où se réunissaient alors les adeptes de la culture Hip-hop naissante. Aujourd’hui détruit, il reste l’objet d’une mythologie trompeuse : ce n’est pas ici que se réunissaient les premiers B-Boys français, mais plutôt ici qu’ils se sont retrouvés, une fois l’euphorie médiatique des années 1980 retombée. On avait affaire à des radicaux, et c’est ici qu’ils ont fini par inventer, à l’écart de médias devenus moqueurs, ce qu’on appelle aujourd’hui le Hip-hop français.

Dee Nasty

©Enrique/Aktuel Force

2. On ne célèbrera jamais assez Daniel Bigeault aka Dee Nasty. Compositeur, producteur, DJ, multi-instrumentiste dont les notes résonnaient alors jusque chez les Rita Mitsouko, il est le Grandmaster des après-midi du terrain vague de la Chapelle, le représentant local de l’Universal Zulu Nation et l’un des premiers à se décarcasser pour que cette culture qu’il a découverte aux Etats-Unis soit diffusée en France – à travers ses émissions de radio, sur RDH ou Radio Nova. En 1984, armé d’un sampler, de deux platines et d’une table de mixage rudimentaire dont le crossfader était bricolé par un ami, il enregistre « Paname City Rappin’ », le premier album de rap français.

Hip hop graff

©Mat JacobTendance Floue

3. Lorsque le terrain vague de la Chapelle est détruit, graffeurs et tagueurs se dispersent dans la ville, descendent dans les galeries du métro, retournent les palissades, franchissent les murs et repeignent la ville, son mobilier et ses transports en commun. Colorz, illustre représentant du crew V.E.P. (Vandales En Puissance) termine ici un whole-car, soit une rame de métro repeinte du sol au plafond. Suite au carton de la station Louvre-Rivoli, opéré en 1991 par trois graffeurs, la RATP et les pouvoirs publics prennent conscience de l’ampleur du phénomène et y portent un coup d’arrêt, tandis que la justice prononce pour la première fois des peines de prison à l’encontre des responsables.

Akhenaton

©Pierre Terrasson

4. Alors que le hip-hop français cartonne sur les ondes, Akhenaton (IAM), se moque de l’industrie du disque en campant, dans le morceau « J’ai pas de face » (1995), le personnage de Gamani, un directeur artistique véreux qui surfe sur les modes et transforme le rap en un ersatz de variété commerciale, moquant au passage boys bands et starlettes en plastique. Si le thème est récurrent dans le rap américain comme français, la période est particulièrement bien choisie…

Secteur A

©Valerio

5. Les propos que Benjamin Chulvanij, alors directeur artistique chez EMI, tient dans mon livre résument à eux seuls cette photo de Stomy Bugsy, Passi et Doc Gynéco dans un grand hôtel parisien en 1998 : « Un type comme Stomy ne voulait pas être simplement une star dans son quartier, il voulait être une star, tout court. En tant que directeur artistique, je voulais donc que ces artistes donnent leurs interviews dans les mêmes endroits que n’importe quelle star du rock ou de la variété. Je louais alors pour eux les salons de l’Hotel CostesPlacebo et consorts donnaient à la même époque leurs interviews ».

Bboy Mounir during his Judge Showcase at BC one Cypher France in Paris on July 5th, 2014

Bboy Mounir : BC one Cypher France à Paris le 5 juillet 2014 © Little Shao

6. Le Hip-hop en France, c’est aussi la danse. Mounir fait partie d’une nouvelle génération de B-Boys qui ont réinventé le breakdance à l’aube des années 2000. Avec son crew Vagabonds comme en solo, il a remporté des championnats aussi prestigieux que les Notorious IBE, Chelles Battle Pro ou Battle Of The Year, jusqu’à ravir, en 2012, le titre de champion du Red Bull BC One – le championnat du monde de breakdance en solo. Clarté du mouvement, précision du geste, il rejoue à l’été 2016 le battle qui a opposé, quinze ans plus tôt, son crew Vagabonds au Wanted Posse en finale du Battle Of The Year. Un combat légendaire qui allait marquer l’ascension des B-Boys français sur la scène mondiale.

SCH

©Koria / Def Jam / Universal Music France

7. Année 2015. Catogan, jeans slim et méchante gouaille sudiste, tout est nouveau chez SCH – comme chez une poignée de ses compères qui changent le game au même moment. Théâtre urbain aux mœurs âpres et aux manières fortes, SCH c’est du Zola dans les cités d’Aubagne, familles recomposées, abandons et vie de rue à l’appui – Maheu avec un Uzi, tristesse en bandoulière, outillé comme à Medellin. C’est la vie de merde vue sous un autre angle, tirant derrière elle des sacs de dissensions internes – qui échappent bien souvent à son auteur. Et c’est brillant.

L’excellent livre Hip-Hop : une Histoire française de Thomas Blondeau (éditions Tana) est disponible partout. 191 pages, des textes passionnants, des centaines de photos (dont certaines très rares) : nous vous le recommandons chaudement.

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