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Société
Par Noé Michalon

Pacôme Sakalou Sakalou : « C’est le Mali qui m’a adopté »

Dans la nuit tombante et étouffante d’Abidjan, au raz des pots d’échappements des taxis bringuebalants, les Musulmans du quartier de Marcory déroulent leurs tapis pour la prière du soir.
Adossé à la devanture de sa boutique d’équipements, Pacôme Sakalou Sakalou a passé une longue journée. Ivoirien adopté par un Malien, ce jeune entrepreneur garde les yeux bien éclairés malgré l’attentat qui a frappé un hôtel de Bamako, la capitale de son pays adoptif, ce matin.

Que faisais-tu quand tu as appris qu’une attaque visait Bamako ?
Je travaillais sur un devis, que je devais ensuite amener à Yopougon, à l’Ouest d’Abidjan. J’ai dû tout annuler, j’avais le moral abattu, mais je me suis remis. Je suis resté pour prendre des nouvelles. Heureusement, tout le monde au Mali va bien.

Que représente Bamako pour toi ?
C’est un endroit qui m’est cher, une ville agréable et le pays de mon père adoptif. Je n’y suis pas allé, mais je suis déjà allé à Ségou. Avec ce drame, c’est quand même toute une partie de ma famille qui est touchée.

Quand tu entends le nom de cette ville, tu penses à quoi ?
A ses habitants joviaux, à leur joie de vivre. Quand les Maliens veulent défendre quelque chose, ils parlent immédiatement de leur pays ! Bamako, c’est un point de rencontre entre les commerçants depuis l’Antiquité, c’est une ville qui attire depuis longtemps, c’est une ville très intéressante, je rêve d’y aller un jour. J’ai failli y aller, mais quand notre voyage a été annulé, j’ai eu un gros pincement au cœur.

Tu as donc été adopté par un Malien ?

Oui, j’ai eu la chance de connaître ce père adoptif, par son canal, j’ai adopté la culture malienne, le Mali m’a adopté. Les Maliens sont des gens accueillants, solidaires, je suis fier de ce peuple.

La langue bambara [principale langue locale parlée au Mali, NDLR] est intéressante quand vous la comprenez, elle est pleine de secrets et de proverbes. Les Maliens ont donc un bagage culturel et historique passionnant grâce à cette langue.

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A gauche, Pacôme, avec son ami Erèba Diaby, lui aussi malien.

Quel proverbe te vient à l’esprit avec cette actualité ?
Il y en a tellement ! Mais je pense tout de suite au « découragement qui n’est pas malien ! ». Quand un malheur nous arrive, on le range vite dans le passé

Je pense aussi à Oumou Sangaré, qui chante dans ses chansons « Mogo tè Diabèhé », « dans la vie, tu ne peux pas plaire à tout le monde », et sachant cela, la vie continue.

Tu rêves encore du Mali malgré ce qu’il se passe ?
Absolument, si j’ai l’occasion, j’irai. Ces gars, là, en aucun cas ne me feront fléchir, c’est un épiphénomène. Je crois que le gouvernement y remédiera en renforçant sa sécurité.

Comment réagit-on quand on voit des tueurs prétendre appartenir à ta religion ?

Ce ne sont pas des Musulmans, un Musulman digne de ce nom ne peut pas commettre ce genre d’acte, il doit prôner la paix, la tolérance et l’amour. Ces gens sont mal partis, loin d’emmener les gens auprès d’eux, ils les chassent, et ils n’inspirent que la haine contre eux. Dans aucun passage du Coran il n’est écrit qu’il faut tuer pour défendre ta religion.

Y aurait-il une musique, un texte, une œuvre d’art que tu recommandes pour mieux faire connaître le Mali ?
Je pense immédiatement aux sites historiques de tout le pays. Celui qui visitera le Mali sera ravi.

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La grande mosqué de Djenné, au Mali, est le plus grand édifice en terre crue d’adobe dans le monde.

Mais pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer, il faut écouter les chansons de Salif Keita, qui chante avec beaucoup de proverbes. J’aime toutes ses chansons et ses textes et il manie tous les instruments, le balafon, la kora et les castagnettes. Ce sont des sonorités uniques, quand tu l’écoutes, tu es dans une autre dimension, dans un autre univers.

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