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Le Gros Journal

La grosse version du Gros Journal : Marina Foïs, l’interview irréprochable

Juste après la diffusion du Gros Journal, retrouvez en exclusivité la suite de l’interview en version longue sur Clique. Mouloud Achour, son invité et un gros +.  Ce soir, c’est au café de la Presse, lieu d’échanges et de mixité, que Mouloud Achour reçoit Marina Foïs. L’actrice nous parle de son rôle dans Irréprochable, qui sort en DVD, dans lequel elle incarne Constance, une femme en manque de reconnaissance et prête à tout. L’occasion de s’interroger selon Marina Foïs sur les « monstres » que produit la société sans les assumer. Elle regrette aussi la pauvreté des rôles proposés aux femmes dans le cinéma, nous livre sa vision sur la mixité sociale et critique la dangerosité de certains discours.


Interview de Marina Foïs version longue – Le… par legrosjournal

 

Mouloud Achour : Comment ça va Marina Foïs ?
Marina Foïs : Bien.

Avant toute chose, sache que je suis amoureux de toi depuis la nuit des temps.
Alors ça, c’est une très bonne nouvelle.

J’étais amoureux de toi et d’Athéna, dans « Les Chevaliers du Zodiaque ». Aujourd’hui, on va parler d’ « Irréprochable ». L’histoire d’une dame toujours au chômage à 40 ans.
En fait, c’est quelqu’un qui se bat, qui est dans la survie mais qui n’a rien de soumis et c’est quelqu’un qui est prêt à tout pour récupérer ce qu’elle estime qui lui est dû. Le problème, c’est la fin de la phrase, « qui lui est dû ». Elle pense à tord ou à raison que la société lui doit d’avoir une vie qui lui convient. En réalité, ce n’est pas comme ça que ça se passe. Surtout pour une femme qui n’est pas mariée, qui n’a pas d’enfants et qui au fond, n’est reconnue par personne. Ça lui donne une violence hallucinante et ça raconte aussi comment on a besoin de cadre et que quand la société nous exclut, quand il n’y a plus de cadre, c’est l’occasion pour la névrose et la psychopathologie de s’enflammer. Il y a plein d’endroits où la société produit ses propres monstres et elle ne les assume pas. D’où l’absurdité de la déchéance de nationalité.

On peut évoquer la phrase de Manuel Valls qui dit : « Il ne peut y avoir aucune explication qui vaille car expliquer c’est déjà vouloir un peu excuser ». Est-ce que ce sont des phrases de gauche ? Ne pas vouloir comprendre…
Je pense que ce sont des phrases qui ne servent à rien. Comprendre ça ne veut pas dire valider, ça ne veut pas dire donner l’absolution, ça ne veut pas dire bénir. On est obligé de comprendre surtout si on est un homme politique. On est obligé de comprendre ou de chercher à comprendre le fonctionnement du monde dans lequel on vit.

Quand tu parles des monstres que la société peut créer…Comment est-ce que toi aujourd’hui, en tant que simple mère de famille qui a des mômes qui grandissent dans cette époque, tu arrives à les protéger ? On a eu une enfance Arnold et Willy.
C’est quoi une enfance Arnold et Willy ?

On a grandi dans une France où la mixité avait un sens, où il n’y avait pas de question identitaire et toutes ces choses-là. Et j’ai l’impression que grandir quand on est un môme est aujourd’hui hyper compliqué.
Alors moi je n’ai pas la même perception et je dois avouer que je pense que je suis complètement coupée du monde dans lequel je vis. Quand les gens me disaient que Trump allait être élu, je riais à gorge déployée. Je les ai méprisé. Ce n’était pas une discussion. Et puis Trump a été élu. Je me suis dit que j’avais un vrai problème de perception du monde, que je vivais ailleurs. Moi j’ai grandi dans une banlieue à Orsay-ville, une banlieue de profs et donc pas la banlieue des cités. Mais nous n’étions pas du tout mélangés. J’ai appris que j’étais juive et j’ai appris que c’était une différence. Je pense que mes enfants sont aujourd’hui beaucoup plus mélangés. Je les trouve ultra sensibles à la question du racisme. Mon fils me dit toujours : « La prof de SVT est raciste, elle n’a pas interrogé Icham ». Moi je crois aux pratiques. Je pense que ce sont les discours qui pourrissent le vivre-ensemble. En réalité, je suis sûre que les gens sont capables de se mélanger.

Moi je fais partie des gens qui pensent qu’on est beaucoup moins divisés que ce qu’on veut nous faire croire.
Mais évidemment ! Je suis sûre de ça et c’est pour ça que j’en veux beaucoup aux gens et aux médias qui donnent trop la parole aux gens qui ont un discours de merde et qui sortent des bouquins débiles pour véhiculer de la merde. Je pense que la pensée merdique, c’est comme l’humidité. Ça pénètre, ça infuse. Et il faut absolument empêcher l’infusion. C’est de ça dont je voudrais parfois protéger mes enfants. Il y a des pensées qu’ils n’ont pas besoin de connaître. Ça ne sert à rien.

Et pourquoi ce que tu appelles « la pensée merdique » est omniprésente à la télévision ?
Il m’est déjà arrivé d’être invitée à l’émission de Ruquier avec Zemmour en plateau. Pourquoi est-ce que je ne me suis jamais levé en disant : « Excusez-moi, en fait j’ai les oreilles propres, j’ai envie de les garder propres. Je reviens quand Monsieur a terminé ». Pourquoi est-on si soumis ? Qu’est-ce qu’il se passe ?

Dans l’actualité, il y a des mots nous énervent, qui nous interpellent, qui sont répétés tout le temps. On appelle ça des gros mots et le gros mot de Marina Foïs, c’est « mixité ».
J’ai choisi le mot mixité parce qu’il est perçu comme un gros mot par beaucoup et je ne comprends pas pourquoi les politiques et surtout la gauche, ne sont pas plus pédagogues là-dessus. Je pense que la mixité est une chance, que l’immigration est une chance, qu’il faut juste décaler le discours et que c’est très simple. Je pense que je suis la première française de ma famille. Pour moi les drapeaux n’ont aucun sens, je viens de partout. Je trouve que la frontière est absurde, presque marrant. A un moment, qui l’a décidé ?

Pourquoi est-ce qu’on a l’impression aujourd’hui qu’il y a une aversion des valeurs ou quand on dit ça, on est un bisounours ? Que quand on dit ça, on est un bobo ?
Et bien moi je suis un bobo bisounours. J’ai une vie, tout sauf de bisounours. Je m’en fous que l’utopie, les idéaux, les rêves soient ringards ! Pour supporter la merde où on vit tous…Qu’est-ce qui fait qu’on n’a plus le droit d’avoir des principes de base ? Moi je hais le mot « valeurs » mais en principe, oui, j’ai le droit d’en avoir. Je suis pour le mélange, à tous les endroits. Parce qu’on est multidivisés. Il y a les séparations économiques et de race. Le repli m’angoisse terriblement. Et puis on le sait : les aristos qui ont baisé entre eux ont fait des mongoliens ! On meurt de maladies génétiques quand on se reproduit entre nous. C’est la vérité, c’est médical, ce n’est pas bisounours. Pour des raisons médicales : mélangez-vous.

Est-ce que quand on a été dans l’une des bandes les plus marrantes comme « Les Robins des Bois », on est durs quand on reçoit un scénario de comédie ?
Je suis dure avec la comédie parce que la comédie en France n’est pas assez cinématographiquement innovante. C’est pépère. Surtout dans l’écriture des comédies, où le rôle des femmes est très pauvre. On est quand même réduit à notre état de femme dont on cherche à s’échapper toute la journée. On t’écrit que des trucs où il y a des nymphomanes, hystériques, mal baisées ou des trucs où tu n’as pas de mecs, tu n’as pas de gosses. Ça ne parle que de nichons, ça ne m’intéresse pas. Moi je veux qu’on m’écrive des rôles d’homme en comédie. Moi je veux être Sacha Baron Cohen.

Et bien qu’est-ce que tu attends ?
Mais moi je ne suis pas auteur, je n’ai pas d’idées ! Peut-être qu’un jour j’en aurai mais je ne sais pas le faire.

Moi je sais pourquoi j’ai toujours été amoureux de cette meuf. Et je te suis sur Instagram.
J’ai vu, je te suis également.

Suivez-la sur Instagram, on se retrouve demain pour le Gros Journal. À demain !

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